La présentation proposée exploite la notion de seuil Constitutionnel comme entre deux, c’est-à-dire en tant que lieu de rencontre et, partant, en tant que lieu d’altérité. Elle explore cette question dans le cadre d’un rappel du problème qui accompagne souvent le transfert des normes juridiques d’une communauté politique vers une autre et partant, d’un espace culturel et politique vers un autre.
La question s’est notamment posée dans le cas des États africains au lendemain de leur indépendance. À l’époque, et aujourd’hui encore, la définition d’un ordre constitutionnel national exige l’importation de normes, sinon de modèles constitutionnels et politiques, inspirés d’États de droit déjà établis. Il est inévitable que ces emprunts s’accompagnent d’un transfert des référents culturels, malgré la forme supposée universelle qu’emprunte la normativité juridique. L’expérience juridique et politique des États africains démontre la difficulté qui accompagne ces greffes constitutionnelles. Des orientations et des systèmes de représentations différents, sinon opposés, se rencontrent alors au seuil du droit, tantôt inspirés par des principes et des normes constitutionnelles reconnus au plan international (et prenant la forme de standards constitutionnels), tantôt par les contraintes imposées par le contexte politique et les rapports de force nationaux, sinon par les normes juridiques et institutionnels établies localement. Le droit constitutionnel devient ainsi le lieu d’une négociation culturelle complexe, à la jonction des orientations inspirées par les États « du Nord » et réinterprétées par ceux « du Sud ». Il fonde le seuil d’une discussion continue, le débat constitutionnel devient, dans ce contexte, un lieu d’altérité normative et culturelle.