L’action collective moderne a vu le jour en Amérique du Nord il y a plus de 50 ans. Conçue pour libéraliser les droits et libertés civiles des citoyens américains, l’action collective s’est transformée en un outil utilisé par certains défenseurs de l’intérêt public en vue d’instituer des poursuites visant des changements institutionnels, pour contrer la discrimination ou pour favoriser une amélioration de l’éducation des citoyens. Plus tard, aux États-Unis, les litiges de masse ainsi que l’augmentation des frais extrajudiciaires ont mené les avocats à conceptualiser autrement l’action collective pour l’utiliser dans un objectif de profit. Cette action collective se renouvela alors sous une nouvelle forme de litige complexe fort prometteuse.
Le Canada, en écho aux États-Unis, a introduit l’action collective dans ses mécanismes procéduraux, avec une évolution similaire. Apparu au Québec en 1979, le recours collectif a eu un effet électrisant à travers la société. Après de lents débuts, de plus en plus d’actions collectives ont été autorisées pour permettre plusieurs processus de recouvrement collectif fructueux dans différents dossiers. Au début des années 80, la Cour suprême du Canada a insisté sur l’utilité et les objectifs de l’action collective. Suivant ces commentaires, le mécanisme procédural collectif a été intégré dans les autres provinces canadiennes.
On peut aujourd’hui dire que le volume annuel important d’actions collectives, leur variété, les montants réclamés et accordés ainsi que la croissance constante du volume d’actions collectives à travers l’Amérique du Nord laissent croire que l’action collective s’est solidement enracinée. Toutefois, certains auteurs américains semblent observer l’existence d’un déclin global de l’action collective dans les jurisdictions de common law. La Cour suprême des États-Unis, dans les récents arrêts Italian Colours, Wal-Mart et A.T. & T., a réduit de semblable façon la portée et les utilisations des actions collective en sol américain. En comparaison, la Cour suprême du Canada, en 2015, a cherché à renverser une certaine tendance prédominante à favoriser la partie demanderesse, et a commencé à faire preuve d’une certaine réticence à autoriser des actions collectives globales et nationales.
L’objectif de ce colloque est d’entâmer une réflexion sur l’évolution de l’action collective, de ses objectifs et usages initiaux aux pratiques et visées contemporaines. Nous nous questionnerons à savoir si l’action collective est satisfaisante pour les parties en demande, les membres du groupe, mais aussi pour le grand public, et ce, par l’analyse de données empiriques actuelles. Plusieurs questions seront posées : Quelles étaient les conceptions, usages et les effets originaux de l’action collective et comment ont-ils évolué au cours des dernières décennies en Amérique du Nord? Quelle(s) preuve(s) (et données) avons-nous en main pour vérifier si les objectifs d’indemnisation, de dissuasion et d’efficacité ont été atteints? Quel est l’effet de l’action collective en tant que mécanisme procédural dans la pratique actuelle du droit?